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Il existe, aux archives de l’Essonne, un document remarquable qui constitue, en quelque sorte,  « une photographie » de Soisy-sur-Ecole en 1900.

En effet, à l’occasion de l’Exposition Universelle qui allait se tenir à  Paris en 1900, le ministère de l’Instruction Publique demanda dès 1898 à tous les directeurs d’école de rédiger une monographie sur leur commune. Celle de Soisy fut réalisée par M. Victor Félicien Gingréau, qui était alors instituteur à Soisy depuis 1885, après avoir été en poste à Dannemois. Elle est datée du 20 Septembre 1899. Elle comporte une trentaine de pages, d’une très belle écriture. Il est intéressant d’en faire un résumé et d’en extraire les indications les plus significatives, notamment pour ceux des lecteurs du « Trait d’Union » qui n’auraient pas la possibilité, ou le temps, de consulter le document original.

Au recensement de 1896, Soisy compte 582 habitants, dont 197 ménages répartis dans 183 maisons. Il y a 181 électeurs. En outre, une trentaine « d’étrangers » (sic) habitent alors provisoirement la commune, du fait des travaux d’adduction des eaux du Loing et du Lunain (affluent du Loing). La population est restée très stable pendant le 19ème siècle. Cependant, il est indiqué que le choléra a fait 14 victimes en 1832 et que la fièvre typhoïde en a fait 15 en 1859.

Sur les 1152 hectares de Soisy, 798 sont alors des terres labourables, 190 des bois, 45 des pâtures, 40 des « terres plantées » (vergers), 16 des vignes, le reste en divers…le tout réparti en 8124 parcelles (on se rend compte du morcellement…) partagées entre 813 propriétaires (dont un grand nombre, manifestement, n’habite pas Soisy), et réparties en 61 lieux-dits, aux noms tous différents. Certains noms nous sont encore familiers, comme Frémigny, Montaquoy ou les Murs de Baronval ; d’autres, souvent pittoresques, sont aujourd’hui moins connus:  « La vente au comte d’Evreux », « les Goubillons », « La Fleur de Lys », « L’orme à Gautier », « La pièce d’Enfer »,  « Derrière la hiboudière », « Les rochers aux gamins », etc…
L’auteur décrit la rivière Ecole (34 km), mentionne les deux moulins en activité sur le territoire de Soisy (Moulin des Réaux et Moulin Neuf), et précise que le Moulin des Noues n’est qu’une simple maison bourgeoise.

Après avoir répertorié les diverses voies de communication : Chemins de Grande Communication, Chemins Vicinaux, Chemins Ruraux, Sentiers, il mentionne le projet de chemin de fer, regrettant qu’il ne soit pas encore réalisé. Un « omnibus » (hippomobile) relie deux fois par jour Soisy à la gare de Corbeil en passant par Nainville, Auvernaux et le Coudray-Monceaux.

Il donne ensuite en détail la liste de la flore et la faune que l’on trouve alors à Soisy. Il nomme une quarantaine des plantes les plus communes, la plupart avec leurs noms coutumiers tels que « le bouillon blanc », « la bourse à pasteur », « la douce-amère », « la grande joubarde »,   « le fumeterre », « le pas d’âne », etc…les arbres les plus courants : chêne, châtaignier, mais aussi acacia, bouleau, charme, pin, sapin, frêne, hêtre, tilleul, noisetier, tremble, peuplier, aulne, saule, etc…

Il indique ensuite la plupart des animaux de toutes sortes que l’on peut rencontrer, et souligne qu’étant donné les parties boisées de la commune il devrait y avoir beaucoup de gibier, mais que les trente chasseurs que compte alors Soisy, sans oublier les braconniers, le font disparaître de plus en plus.

Il détaille ensuite les produits de la terre. Les vergers sont surtout plantés de fruits à noyaux : pruniers, pêchers, cerisiers et guigniers (la guigne est une espèce de cerise dont on sait, depuis des siècles, tirer une liqueur ). Il y a aussi des pommiers et des poiriers, « mais le poirier y pousse assez difficilement ».

Voici, ainsi qu’il les énumère, les principales productions agricoles de Soisy, à cette époque, pour l’ensemble de la commune, par ordre de valeur décroissante : la principale production est le blé qui, entre le grain et la paille, représente 230 000 fr ; suivent, d’assez loin, l’avoine, puis le seigle, les prairies artificielles (luzerne et sainfoin), les betteraves (fourragères et à sucre), les pommes de terres, et quelques autres cultures. Le tout, blé compris, représente près de 400 000 fr, et est produit par 50 cultivateurs, dont beaucoup louent des terres. Nombre d’entre eux suivent les conseils du Directeur Départemental (de l’agriculture), et font analyser leurs terres pour déterminer les engrais à employer.…Si l’on considère que, en 2015, il n’y a plus que 5 entreprises agricoles qui travaillent sur le territoire de la commune, on réalise l’ampleur de la concentration de l’agriculture en un siècle.

Il y a aussi, on l’a vu, un peu de vigne ; son rendement apparemment très faible (10 hectolitres de vin par hectare), donne à penser qu’une partie du raisin cultivé est peut-être du raisin de table. Le prix de vente du vin produit, 30 fr / hl, (soit 30 centimes de franc par litre) montre qu’il s‘agissait d’un vin de consommation assez courante…..La valeur globale annuelle de la production de fruits est d’environ 10000 francs. La plupart sont vendus à des marchands en gros habitant Soisy ; cependant certains particuliers les vendent eux-mêmes sur les marchés des environs.

La production et la vente de légumes verts, surtout des asperges, rapporte 2000 à 3000 francs par an.

On n’élève alors pas de bétail « pour la viande » à Soisy ; cependant, en 1898, on dénombre: 120 chevaux, 7 ânes, 100 vaches ou génisses, 500 moutons, des porcs, chèvres etc...
La production annuelle de lait représente 16800 francs pour 1400 hectolitres (donc 12 centimes de franc par litre) ; celle de laine 1750 francs. Il y a des volailles diverses, et des ruches qui produisent miel et cire.

A côté de l’agriculture, il y a dans le village d’autres activités : on y trouve à cette époque deux entrepreneurs de maçonnerie, occupant 10 ouvriers, trois maréchaux-ferrants, deux mécaniciens, trois marchands de volailles, beurre, fromage, dont deux exercent un commerce en gros, faisant venir des produits du Loiret et même de la Nièvre, pour les réexpédier aux Halles à Paris. Il y a nombre de petits commerçants et artisans. « L’industrie » de Soisy consiste alors en plusieurs carrières de grès, qui fabriquent pavés, bordures, boutisses (pierres que l’on dispose transversalement dans les murs pour les consolider) ; le tout part vers Paris et sa banlieue.

M. Gingréau poursuit avec quelques éléments historiques ; il donne une liste de seigneurs ayant possédé les différents fiefs de Soisy (Réau, Montaquoy, Limery, Frémigny ..) de 1588 à la Révolution, puis celle des Notaires et procureurs fiscaux de 1683 à la Révolution, celle des 28 curés qui se sont succédés de 1570 à 1899, et la liste des maires de 1794 à 1899.

Il résume l’histoire de la scolarisation des enfants à Soisy, que nous avons développée dans de précédents articles, et donne la liste de 16 instituteurs qui, avec des statuts divers, ont enseigné à Soisy depuis 1675, et celle des institutrices, 10 depuis 1880 (ce nombre est étonnant : 10 institutrices se sont succédées en 20 ans !). Il indique qu’en 14 ans, 70 élèves sont sortis de son école de garçons; 40 d’entre eux ont obtenu le certificat d’études. Les deux classes uniques, garçons d’un côté, filles de l’autre, mélangent, bien sûr, tous les niveaux : pour 80 élèves environ, il y a un instituteur, une institutrice.

Il mentionne enfin que presque tous ses élèves possèdent un livret de Caisse d’Epargne, et que 13 d’entre eux sont inscrits à la « mutualité scolaire ».

M. Gingréau sera conseiller municipal de 1908 à 1919. Pendant la Grande Guerre, en 1917, il assurera même pendant quelques mois, enl’absence d’adjoint, les fonctions du maire, celuici étant tombé gravement malade. Grace à cet homme, qui a manifestement joué, pendant de nombreuses années, un rôle important dans le village, nous avons une précieuse et minutieuse description de Soisy sur Ecole en 1900.

Claude Alard, conseiller municipal
Décembre 2015


Nota : pour la valeur équivalente actuelle du franc de 1900, on peut se reporter au « nota » qui accompagnait les précédents articles.

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